Boulette Journal

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Et je suis une bête en colère. Les abus de confiance me font vriller.

Des stéréotypes du passé ne cessent de revenir depuis deux ans, sans gêne ni honte, avec les démarches les plus condescendantes. Ils font semblant de prendre de mes nouvelles (très souvent de la même manière), de me vouloir du bien après que notre lien se soit distendu ou rompu. Par l’oeuvre du temps ou par volonté propre. Les raisons pour lesquelles ils sont sortis de ma vie sont révolues mais très vraies. Je leur souhaite le meilleur et je garde mes distances. On dirait des tests pour savoir si j’ai compris la leçon, si je vais retomber dans le même piège. Je me répète que je connais leur nature, qu’ils l’ont révélé au moment opportun. Je ne peux impulser un changement positif en tentant de faire du neuf avec de l’ancien.

De cet atelier que j’ai réussi à mettre en place et qui connait un succès étonnant au sein d’une entreprise où ce n’est pas ma fonction première. Je le porte seule bénévolement à bout de bras, en faisant fi des regards et des remarques qui m’auraient valu le bûcher. J’ai toujours voulu regarder le côté positif dans mon approche et dans ma pratique. La vérité est que la majorité des participants est incapable de tenir une parole ou un engagement. Ils abusent et gaspillent ce qui est gratuit comme des enfants capricieux face à un buffet à volonté. Ils consomment. Plus le temps passe, plus les répétitions sont fortes et graves. Je suis la seule à pouvoir y mettre un terme. Cet atelier me manquera. C’est presque drôle de le voir finir par le point où il a commencé…

À force d’être traitée pour ce que je ne suis pas, je suis invitée à le devenir. Ce chapitre m’a montré de quoi j’étais capable dans ce domaine et l’appel, presque urgent, à commencer le suivant est terrifant. Petit à petit, je lâche ma culpabilité. J’arrive à me dire que cette décision n’est pas une démission mais le geste le plus juste pour être respectée dans un cadre à poser pour vivre ce que j’aime et de ce que j’aime. Je peux créer ce cercle vertueux et équilibré.

De ces gens qui entretiennent un rapport ambiguë et étrange selon les saisons, qui soufflent le chaud quand ils ont besoin de participation pour voir leurs projets devenir populaires puis le froid pendant des mois de silence, de l’absence de réponse aux messages que je leur envoie, de la sécheresse de leurs réponses toutes maigres… Pas de printemps ni d’automne. On prend, on pompe, on jette. Avec quelques plumes et billets au passage. Derrière l’étiquette de "je fais du yoga en pleine conscience" se cache, parfois, des manipulateurs ordinaires.

Chacun se rappelle ma gentillesse, mon bon fond, ma disponibilité d’écoute. Chacun se permet d’essayer, de forcer le passage parce qu’ils croient qu’un pardon ou un sourire donne l’autorisation de repartir de zéro ou de répéter ce qu’ils ont déjà fait. Certains vont même jusqu’à me vendre que c’est me rendre service que de leur rendre service. Je refuse, respectueusement.

Ma colère se dirige aussi contre moi-même et tout ce qui continue de me faire réagir avec autant d’acidité, chez moi et chez les autres. De ne pas être plus investie dans ce second semestre d’études et démotivée par le laxisme des équipes pédagogiques. De sentir cette envie chronique de tout plaquer en croyant que cela fera avancer les choses plus vite, dans le bon sens…

Dans quelques jours, il remontera sur scène. Je suis toujours très émue de voir ses énergies se déployer pour réaliser son rêve. Je suis en colère de laisser mes incertitudes sur mon avenir professionnel me retenir de poser les jours et prendre les billets pour être à ses côtés. D’une autre part, je sais au fond de moi, qu’on se rencontrera à nouveau bientôt. Il viendra. Je serai là.