Mon sang est peut-être la dernière chose que je donne cette année. J’espère qu’il sera utile à d’autres. J’espère aussi que, cette fois-ci, mon don ne sera pas rejeté et porteur de mauvaises nouvelles. La dernière fois restera un choc. Il est vrai que j’apprécie la vie différemment depuis que j’ai conscience que je peux mourir en éternuant. C’est très simple. C’est ridicule.

J’avais besoin d’y retourner pour régler ce petit différend avec moi-même. Les infirmières étaient très gentilles. De la fenêtre, pendant la collation, je voyais l’hôpital et la pierre blanche du pavillon psychiatrique. Ma colère se dirigeait vers tout le monde, vers personne. Elle ne sert à rien.

Ma tête est un peu lourde. Les larmes m’ont brulé les yeux dans la salle d’attente, sans couler. J’ai été courageuse jusque là… Du moins, je me trouvais courageuse et c’est ce qui me donnait du courage. Beaucoup de souvenirs se bousculent depuis quelques jours. J’ai allumé un cierge entre le Réveillon et Noël. Il s’est consumé lentement. J’ouvrais les yeux au milieu de la nuit. J’avais l’impression de voir une étoile autour de la flamme. Elles me tenaient compagnie.

Je me suis séparée de plusieurs créations. Certaines ont été offertes, d’autres ont été créés pour l’occasion et d’autres ont été rendues à l’Univers. Je tenais particulièrement à l’une d’entre elles. La personne à laquelle je l’ai adressée ne m’a pas écrit. Pas un voeu, pas un mot de remerciement. Il en va de même pour les voeux que j’ai adressés à l’ensemble des participants de mes ateliers avant la fermeture annuelle. De même pour cette amie à laquelle j’ai pensé chaque jour et souvent écrit pour la soutenir dans cette grossesse éprouvée par une trisomie. De même pour cette personne dont les derniers mots étaient "ne plus vouloir à faire avec moi" et qui me recontacte presque deux ans jour pour jour après m’avoir craché au visage. Elle a oublié, évidemment. Et elle aura prochainement besoin de quelque chose, évidemment.

Je suis la famille et l’amie de gens qui ne sont pas les miens. Il suffit.